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L'Atelier de la Psyché

Novembre : Le conte de la lune du Gel

L'Ossature de l'Âme


Novembre était arrivé, et avec lui, le grand dénuement. Les arbres, ayant rendu leurs dernières parures d'or et de pourpre, se dressaient en silence, révélant la pure structure de leurs branches contre un ciel pâle.

Le monde n'était pas mort ; il était revenu à l'essentiel. L'air, purifié par le premier gel, ne portait plus les parfums de la vie exubérante, mais le silence dense de l'introspection.


La Marcheuse avançait dans ce paysage mis à nu, et elle ressentait en elle un écho de cette même nudité. Les grandes tempêtes de l'âme étaient passées, les blessures familiales avaient été honorées et rendues à la terre. La paix était là, mais elle soulevait la plus vertigineuse des questions.

Quand on n'est plus définie par ses combats, ni par ses blessures, ni même par ses guérisons ; quand les rôles de consolatrice, de guerrière ou de tisserande sont laissés de côté... qui reste-t-il ? Qui suis-je, véritablement ?


C'était une quête qui ne demandait pas de marcher loin, mais de descendre profondément. Son pèlerinage la mena comme par instinct dans une forêt de hêtres, un sanctuaire de silence où le sol craquait sous ses pieds. Chaque branche nue était une leçon de vérité, chaque souffle de vent froid une clarification.


Elle s'arrêta, sentant une présence. Haut perché sur une branche squelettique, un Hibou la fixait. Il était une tache d'encre sombre dans le gris ambiant, absolument immobile, ses grands yeux d'or contenant la sagesse de toutes les nuits du monde. Il était le gardien de ce lieu, le gardien de l'essentiel.


Son hululement grave et profond ne brisa pas le silence, il le rendit plus palpable. Ce n'était pas une question, mais une invitation : regarde au-delà des apparences. Regarde ce qui demeure.


La Marcheuse leva les yeux et plongea son regard dans celui du Hibou. Ce ne fut pas un échange, mais une immersion. Les yeux de l'oiseau n'étaient pas des fenêtres sur son âme à lui, mais un miroir de l'univers réduit à sa trame. Elle n'y vit pas son propre reflet, mais la géométrie sacrée du givre, le dessin immuable des constellations, la structure parfaite et nue des arbres. Elle vit l'architecture du monde, dépouillée de toute fioriture.


Et en voyant cela, elle se vit elle-même.

Une compréhension la traversa, non pas comme une émotion, mais comme un frisson de reconnaissance, une évidence.


Elle comprit qu'elle n'était pas ses histoires, si belles ou si tristes soient-elles. Elle n'était pas ses souvenirs, ni les blessures qu'ils avaient laissées. Elle n'était pas ses rôles, ni les masques qu'elle avait portés. Elle n'était même pas la somme de ses guérisons ou de ses victoires.

Tout cela, c'était la chair, les feuilles, la peau. Des couches nécessaires pour vivre, mais qui n'étaient pas l'essence.


Son être véritable, c'était ce qui était en dessous. L'os. La structure. Ce noyau d'être qui avait tenu bon à travers toutes les tempêtes, toutes les mues, toutes les saisons. Une présence simple, silencieuse et absolument indestructible. L'os de son âme.

Le Hibou cligna lentement des yeux, comme pour sceller cette révélation. Il avait montré ce qui devait être vu.


La Marcheuse baissa la tête et posa sa main sur le tronc froid et dur d'un vieil arbre. Elle sentit sa propre solidité intérieure, ce "je suis" fondamental qui n'avait besoin d'aucune histoire pour exister. La peur du vide qui l'avait parfois effleurée se mua en une certitude sereine. Le vide n'existait pas. Il n'y avait que l'essence.


Elle quitta la forêt alors que la nuit achevait de tomber. Elle n'emportait avec elle ni nouvel objet, ni nouvelle mission. Elle repartait simplement habitée par elle-même. La longue saison sombre de l'introspection pouvait venir. Elle n'avait plus rien à craindre, car elle avait enfin touché ce qui, en elle, ne pouvait ni geler, ni se briser, ni mourir.


Les enseignements du conte :

Novembre nous invite à entrer dans le grand silence, là où la nature, dépouillée de ses artifices, nous enseigne la plus profonde des leçons : celle de l'essence. Après avoir exploré nos histoires, il est temps de découvrir ce qui demeure quand elles se taisent. C'est un retour au noyau, au cœur tranquille de notre être.


👤 Qui Suis-Je Sans Mes Histoires ?

Nous nous construisons à travers nos récits : nos blessures, nos victoires, nos rôles. C'est l'archétype jungien de la Persona, le masque social que nous présentons au monde. Mais ce masque n'est pas nous. Ce conte nous pose la question ultime de l'identité : quand on enlève toutes ces couches, que reste-t-il ? La réponse n'est pas une définition, mais une reconnaissance. Sous les mémoires, il y a ce noyau silencieux et inaltérable : le Soi. Il ne se raconte pas. Il se ressent.

  • Questions introspectives : Si je devais me décrire sans utiliser mon métier, mes relations, mon passé ou mes accomplissements, que resterait-il ? Quel mot, quelle sensation, quelle qualité silencieuse ?


🦉 Le Dénuement n'est pas une Perte, c'est un Dévoilement

Le Hibou nous enseigne à voir dans le noir, c'est-à-dire à voir quand les distractions de la lumière ont disparu. La société craint le dépouillement, le voyant comme un manque. La spiritualité et la psychanalyse y voient une clarification. Quand tout s'efface, les ambitions, les attentes, les faux-semblants,ce n'est pas le néant qui surgit. C'est la structure. L'architecture de notre être. L'os de l'âme. Ce qui a toujours été là, discret, indestructible, et qui a tenu bon à travers toutes les tempêtes.

  • À explorer : Quelle est la qualité la plus fondamentale en moi, celle qui a toujours été là, même dans les moments les plus difficiles ? Est-ce ma résilience ? Ma curiosité ? Ma capacité à aimer ? C'est une piste pour toucher l'os de votre âme.


🤫 La Sagesse du Silence

Le bruit du monde et le bruit de notre mental (l'Ego) masquent constamment les vérités plus profondes. Le vrai travail d'introspection ne consiste pas à chercher plus de réponses, mais à créer plus de silence pour que les réponses puissent émerger. Le silence dont il est question ici n'est pas une absence, mais une présence réceptive. C'est dans ce calme que la voix du Soi, habituellement couverte par le vacarme, peut enfin se faire entendre.

  • Pratique douce : Prenez cinq minutes aujourd'hui pour vous asseoir en silence, sans but. Ne cherchez rien, ne demandez rien. Si des pensées viennent, laissez-les passer comme des nuages. Laissez simplement l'espace se remplir de ce qui est là. Écoutez ce que le silence a à vous dire.


🌌 Habiter le Vide : l'Être avant le Faire

Notre plus grande peur est souvent celle du vide. Nous la comblons par l'action, la distraction, le bruit. Ce que la Marcheuse découvre, c'est que ce vide apparent est en réalité le seuil de l'essentiel. C'est un espace de pure potentialité. C'est là que l'on cesse d'être quelqu'un (un rôle, une fonction) pour simplement être. En acceptant de ne plus se justifier, de ne plus avoir à "servir" à quelque chose, on touche à la liberté fondamentale de l'être. Le vide n'est pas le néant ; c'est le berceau du soi véritable.

  • Questions introspectives : À quels moments de la journée est-ce que je ressens le besoin de "remplir un vide" ? Que se passerait-il si, une seule fois, je restais une minute avec cette sensation, juste pour voir qu'elle n'est pas une ennemie ?

 
 
 

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